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SAINT GREGOIRE LE GRAND SUR LES PRETRES QUI NE CONDAMNENT PAS LES ERREURS

Publié le : 12/03/2019 09:10:19
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SAINT GREGOIRE LE GRAND SUR LES PRETRES QUI NE CONDAMNENT PAS LES ERREURS
CHAPITRE 4
Que le pasteur se distingue par sa discrétion et soit pratique en ses paroles.
 

Que le pasteur se distingue par sa discrétion et soit pratique en ses discours, de manière à ne point laisser échapper ce qu'il y aurait lieu de passer sous silence; et de façon aussi à ne pas taire ce qu'il serait besoin de dire. Car autant l'imprudent bavardage peut induire en erreur, autant l'intempestif silence laisse croupir dans l'ignorance ceux qui étaient susceptibles d'être instruits.



Fréquemment, en effet, d'imprévoyants pasteurs redoutant de perdre la faveur humaine n'osent pas librement prêcher la franche doctrine et, selon la parole de la Vérité, s'emploient à la garde de leur troupeau non point avec le dévouement des bergers, mais à la façon des mercenaires : car en se réfugiant ainsi qu'ils font dans le silence, ils s'enfuient à l'approche du loup. Ce sont eux, véritablement, que le Seigneur accuse quand il les qualifie par le prophète de «chiens muets qui ne peuvent pas aboyer.» (Is 56,99). Et, se plaignant de nouveau, il ajoute : «Vous n'êtes pas montés aux brèches, vous n'avez pas élevé muraille autour de la maison d'Israël, pas tenu ferme dans la bataille, au jour du Seigneur.» (Ez 13,5).

Or «monter aux brèches», c'est parler librement contre les puissances de ce siècle pour la défense du troupeau; et «tenir ferme dans la bataille au jour du Seigneur», c'est, par amour de la justice, résister aux assauts des mauvais.



Avoir peur de s'exprimer en toute franchise qu'est-ce, en effet, pour un pasteur sinon, en se taisant, abandonner son poste ? Mais s'il s'expose lui-même pour la défense de son troupeau il élève, face aux ennemis, «une muraille autour de la maison d'Israël.» C'est du pasteur abandonnant son peuple qu'il est encore écrit : «Tes pasteurs ont eu pour toi des visions vaines et folles, ils ne t'ont point dévoilé ton iniquité afin de te provoquer au repentir (Lam 2,14).

Or, dans la sainte Écriture, les prophètes sont quelquefois appelés des docteurs : lesquels en dénonçant comme fugitifs les biens présents révèlent ceux à venir. La divine parole les accuse d'avoir eu des visions vaines, parce qu'en ayant peur de blâmer les péchés ils flattent vainement les pécheurs d'une promesse de sécurité. Et jamais ils ne dévoilent l'iniquité des coupables parce qu'ils s'abstiennent de toute parole de reproche. Or la parole de réprimande est une clef qui ouvre : parce qu'en reprenant elle met au jour une faute qu'ignore souvent celui-là même qui l'a commise. C'est pourquoi saint Paul dit : «Que l'évêque soit en état d'exhorter selon la saine doctrine, et de réfuter ceux qui le contredisent.» (Tite 1,9). De là encore ces paroles de Malachie : «Les lèvres du prêtre gardent la science, et de sa bouche on demande l'enseignement, parce qu'il est l'ange du Seigneur des armées.» (Mal 2,7).



De là cet avertissement que le Seigneur donne par Isaïe, quand il déclare : «Crie à plein gosier, ne te retiens pas, fais retentir ta voix comme la trompette.» (Is 58,1). Effectivement, quiconque accède au sacerdoce assume l'office de héraut, avec la charge personnelle de marcher, en criant à pleine gorge, devant la venue du juge qui suit de près dans un terrible appareil. Si donc un prêtre néglige de prêcher, héraut sans voix quel cri poussera-t-il ?